Cartas del exilio

En marge

La 11ème C.T.E

État des recherches sur les Compagnies de Travailleurs Étrangers - (C.T.E- 1939-1945)

La 11e CTE route du Parpaillon

La 11ème C.T.E


Une histoire personnelle, une recherche collective

C'est mon oncle Juan qui poussa mon grand-père à s'enrôler dans la 11ème C.T.E. Ce dernier ne se fit pas prier tant les conditions de vie et de simple hygiène étaient désastreuses dans le camp d'Argelès-sur-Mer. Et puis il y avait la promesse que si tout se passait bien, ils pourraient rejoindre "bientôt" le reste de la famille. On ne peut pas dire que l'accueil fut des plus chaleureux, mais mon grand-père estimait avoir une dette envers la France. En le laissant passer la frontière avec sa famille, ce pays l'avait soustrait à une mort certaine. Et puis, selon lui, des jours meilleurs allaient arriver. Ce qui malheureusement ne se réalisa jamais.

Avec mon oncle et mon grand-père il y avait environ 250 hommes. Je dis environ car je n'ai pas trouvé la liste de la totalité des membres de cette compagnie. Je connais une partie de leurs parcours: Argelés-sur-Mer d'abord pour la plupart, puis la Condamine-Chatelard au camp du Parpaillon, Novéant-sur-Moselle et Gorzes tout prés et enfin Épinal. Il y a ensuite une phase floue quant à la capture de des membres de la compagnie, certains arrivant à s'échapper. Puis c'est la détention à Belfort au fort d'Hautry. L'envoi dans un camp de prisonniers au fond de l'Allemagne à Fallingbostel pour mon grand père, et la déportation vers Mauthausen.

visages de la 11éme Compagnie - collection personnelle

Paradoxalement c'est sur cette dernière partie ou l'obtention des informations est la plus facile. Les associations, fournissent très rapidement des données, il existe une abondante littérature sur le sujet et le récit des rares survivants est connu. Par contre la recherche de détails entre l'arrivée en France et le départ d'un des camps de concentration français (Argeles, St Cyprien, Bram, etc) peut s'avérer ardue. Pourtant ces hommes étaient rattachés à l'armée ou aux départements. Ceux qui s'engagèrent dans des unités combattantes sont plus facilement retrouvables. Pour cette main d'oeuvre civile qui fut, envoyé près de la ligne de front, avec juste des pelles et des pioches, rien ou quasiment rien.

G.T.E double peine

Pour les survivants des C.T.E qui avaient pu se replier au-delà de la zone d'occupation, d'autres problèmes les attendaient. Les G.T.E et l'organisation Todt approuvée, par Vichy et qui "prêtait" aux forces d'occupation une main d'œuvre corvéable à merci pour construire le mur de l'atlantique, des bases pour sous-marins, et j'en passe. Là aussi, pour certains, il ne resta que la fuite, ou rejoindre la maquis, quand ce n'était pas de le créer de toute pièce. Le sort de ces fuyards quand ils étaient pris c'était la déportation et le plus souvent la mort.

Il y a un peu de tout cela dans la 11ème compagnie, des gens qui purent s'enfuir comme mon oncle Juan ou Magin Marimon, la famille Aguillar (l'oncle et le neveu), ceux qui furent déportés sans espoir de retour comme mon grand-père, son ami "El Fin", et beaucoup d'autres. Puis il y a l'absence d'informations. J'ai des noms mais pas de visages ou le contraire.

Alors je cherche. La toile offre une multitude de données, des accès à des archives, à des documents, des témoignages, des gens qui comme moi ou vous cherchent. C'est le cas de l'arrière petit fils de Magin Marimon Vidal dit "el Fusteret", membre lui aussi de la 11ème C.T.E. Sa famille restée en Espagne avait perdu sa trace, il avait pu s'échapper avant la débâcle, avait travaillé dans une G.T.E dans le sud-ouest de la France, participé surement au maquis. Puis plus rien, le silence. Il a fallu toute l'opiniâtreté de son arrière-petit-fils pour enfin, à force de recherches, de contacts, de voyages sur différents lieux ou Magin aurait pu séjourner, de hasard aussi, pour identifier enfin sa tombe à Pamiers après quelques années de recherches. Magin s'est éteint de mort naturelle dans les années 50, il n'a pu revoir sa femme, sa fille, son pays. Malgré la survie à une guerre, un destin brisé. Il y en eut beaucoup.

Alors je continue de chercher, les hommes de la 11ème C.T.E. Voici, les noms et les visages retrouvés, en espérant qu'un jour les 250 soit de nouveaux réunis. C'est aussi, et surtout, une manière de leur rendre hommage, et de ne pas les oublier.

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